Trouble double (ft Biel)

Trouble double

ft @Biel Rodriguez tw : lieu de prostitution

L’aube pointait le bout de son nez, annonçant la fin du boulot des jollys. La lune accompagnée de ses étoiles laissait place doucement au soleil, astre synonyme de repos et de sommeil pour eux, avant que l’obscurité ne vienne à nouveau les envelopper pour une nuit d’horreur, commençant la plupart du temps par un spectacle burlesque, suivi d’autres spectacles de danses et de chants, les shows privés prenant ensuite la relève de ce repaire de la luxure. Ici, les mots ne comptaient pas, pas ceux des employés en tout cas, qui devaient se plier aux exigences de la clientèle très affluente car toujours très demandeuse des jollys, hommes et femmes confondus. Le Jolly Taps fermait ses lourdes portes tandis que les employés rangeaient et nettoyaient avant de quitter les lieux. Sasha, elle, était dans sa loge, en sous-vêtements après avoir enlever ses habits de lumière, comme on le disait ici en parlant des tenues portées par ceux accédant à la scène. Le miroir reflétait le visage d’un être épuisé dont le visage tiré que les cotons démaquillaient d’un rythme monotone était sans éclat.
Enfilant son peignoir, elle sortit enfin de sa loge, direction la salle de bain commune mise à la disposition des jollys. Rituel sordide en pensant aux péchés qu’ils lavaient dès que possible. Le corps souillé avait besoin de légèreté après chacune des nuits passées entre ces murs enfermant un secret dont certains habitants de Grimwood se doutaient avant d’oublier ses suspicions aussi vite qu’elles n’étaient arrivés dans leur esprit une fois le Jolly Taps hors de leur vue. Une prison à l’apparence dorée alors qu’à l’intérieur, elle n’en était que rouillée. Personne n’en avait que faire de leur sort, après tout.
Croisant rapidement Biel, elle lui adressa un sourire avant de passer la porte de la salle de bain, où se trouvait les quelques cabines de douche à disposition des jollys. Ne perdant pas de temps, elle s’enferma dans l’une d’entre elle. Elle resta de longues minutes sous cette eau chaude qu’elle voyait comme purifiante. Sasha en profita, comme à son habitude, pour passer son corps endolori en revue, grimaçant aux points sensibles qui se devinaient par leur couleur bleutée. Certains clients étaient doux, et d’autres se montraient plus emprunts à laisser leur trace visible sur son corps, comme si celle qui était invisible ne suffisait pas. Son devoir était d’encaisser la chose sans se plaindre, et heureusement que la drogue l’y aidait. D’ailleurs, l’euphorie provoquée par la cocaïne disparaissait petit à petit, mais la nuit était finie, il n’y avait donc plus d’inquiétude à avoir, du moins jusqu’au prochain coucher de soleil.

Trouble double

Ft. @Sasha Flores
TW : Prostitution, traite d'êtres humains.

Une nuit longue, bien trop lente sur la durée. L'une de celle qui ressemblait à tant d'autres. Cette nuit, il avait du satisfaire aux clients qui l'avaient loué. Ils avaient été au nombre de deux, prenant leur temps, payant pour ça. Esclave du sexe qui n'avait pas besoin de désirer ses clients pour savoir que la fonction mécanique suffisait bien souvent. L'entrainement rendait la chose facile, beaucoup trop. Et si ce n'était pas le cas, une petite pilule remplissait tous les blancs. Parce que le choix de dire non, il ne l'avait pas. On le lui avait clairement fait comprendre à son arrivée, et parfois lorsque c'était encore nécessaire. Pourtant, il rêve de prendre le large, s'attelle à réaliser son grand projet, dont la seule vraiment au courant est celle qu'il croise dans le couloir alors qu'elle se rend dans la salle de bain. Il lui rend son sourire, comme s'il ne venait pas de baiser contre de l'argent l'instant d'avant, qu'il n'empestait pas l'odeur de la dernière personne à l'avoir touché et plus encore.

Lui se rend dans sa loge pour s'emparer d'une serviette, de son gel douche. Il compte tout faire disparaître au contact de l'eau chaude et du savon, même ce qui semble incrusté dans sa chair. Il ne tarde pas à la rejoindre dans la salle de bain, entendant l'eau couler, il s'installe dans la cabine voisine et commence à se laver. Il lui arrive aussi d'être malmené, mais il n'est pas forcément celui qui se fait baiser, contrairement à Sasha. Ca va ? qu'il demande pour s'assurer qu'elle va bien pendant qu'il chasse les dernières fragrances, laisse ses mains décrasser ce qui doit l'être. On t'a fait du mal ? Comme s'il allait casser la figure à qui que ce soit. Il en serait bien incapable. Biel n'est pas comme ça. Trop pacifique pour sa propre survie. Trop doux pour le monde qui l'entoure. Même sa colère n'est qu'une pichenette à la dangerosité de l'univers qui les condamne tous les deux à la servitude.

Tu veux qu'on rentre ensemble après ? qu'il ajoute simplement, prêt à la raccompagner jusque chez elle avant de rentrer. Ou rester ensemble s'ils en ont besoin. Des fois c'est juste nécessaire. Souvent fourré avec elle, il est clair qu'elle a une place particulière dans sa vie, qu'il sera toujours là pour elle, si elle l'appelle, s'il se rend compte qu'elle en a besoin. Il poursuit son décapage, veillant à faire oublier à son corps les vestiges d'une nuit de plus. C'est plus facile à dire qu'à faire, mais il est doué pour faire comme si tout allait bien, qu'en refermant la porte, ça ne le suit pas vraiment. Surtout lorsqu'il pense à son projet de fuite. Mais il veut que Sasha aussi puisse s'envoler, tant il a conscience qu'elle vit mal cette situation, plus que lui par moment.

Trouble double

ft @Biel Rodriguez tw : lieu de prostitution

Le constat était comme à son habitude : désolant. Elle repassait dans sa tête le fil de sa vie jusqu’à aujourd’hui, se demandant ce qu’elle avait bien pu faire pour que sa destinée prenne un air si tragique. Ses yeux se fermèrent, tête légèrement relevée pour accueillir l’eau chaude sur son visage et menant sa course le long de ses cheveux, de ses bras, de ses jambes. Elle savait que la fureur qui l’animait au creux de son ventre la rendait forte aux yeux des autres, mais alors, pourquoi se sentait-elle si faible ? Usant et abusant des drogues qui la faisait planer et devenir euphorique afin que les clients désireux de son corps puisse la marquer davantage au fer rouge sans qu’elle n’en ressente la douleur ou qu’elle en soit écœurée sur le moment. L’après était souvent plus compliqué, la conscience reprenant place dans son esprit et la réalité révélant les sévices qu’elle avait subi. Mais une chose était sûre dans cette cage dont elle avait du mal à s’extraire : s’ils pouvaient posséder son corps à leur guise, jamais ils ne posséderont son âme.
Elle ne réagit pas quand elle entendit du bruit, la porte s’ouvrant et annonçant l’arrivée d’un ou d’une collègue. Quelqu’un venant également laver son corps de ce qu’il avait bien pu subir cette nuit. « Ca va ? » Biel. C’était lui, son pilier dans cette mésaventure qui les unissait. « Oui, et toi ? » répondit-elle simplement alors qu’elle se sentait déprimée, lui retournant ensuite la question tout en essayant cependant de ne pas le faire transparaître dans sa voix. « On t'a fait du mal ? » Pourquoi t’inquiètes-tu toujours pour moi ? Tu as pourtant déjà bien à penser en plus de te soucier de moi. Mais il prenait toujours le temps pour elle. C’était comme si elle n’avait plus de secret pour lui, avec cette faculté à lire en elle comme un livre ouvert. Les deux inséparables, comme on les appelait ici, quand le devoir ne les appelait pas l’un ou l’autre. « Non, ne t’en fais pas. » Elle avait déjà connu pire, et elle était quasiment sûre que lui aussi. Ses bleus ne dureront qu’un temps, qu’elle cacherait bien évidemment avec du fond de teint : leur corps étaient la vitrine du Jolly Taps, ils devaient n’être que parfait. Masquer la réalité, ils en avaient l’habitude, que ce soit de cette façon ou d’une autre. Dès qu’ils enfilaient leur tenues et costumes de scène, c’était comme s’ils mettaient un masque, le but étant de cacher les émotions qui les rongeaient.
La douce senteur de la vanille lui effleura les narines tandis qu’elle savonnait chaque parcelle de son corps le plus attentivement possible. Elle le faisait généralement deux fois de suite, voir trois si la nuit avait été plus cruelle avec elle. « Tu veux qu'on rentre ensemble après ? » Hors de question d’aller chez elle, son logement – ou plutôt taudis – se trouvant juste au dessus du Jolly Taps. Mais par chez lui, la proposition était fort tentante, lui redonnant presque un peu d’énergie. « J’veux bien aller voir le lever du soleil sur ton toit. » Elle savait que Biel s’y réfugiait souvent, et elle l’y accompagnait parfois. C’était de là qu’ils pouvaient le plus frôler du bout des doigts cette liberté qui leur était chère. Elle éteignit l’eau, enfin, et sortie de la cabine enroulée dans son peignoir, épongeant ses cheveux avec sa serviette tête baissée avant de la relever dans un mouvement de tête faisant danser ses cheveux. « Mais si t’es épuisé, tu sais que mon lit reste à ta disposition. » Non, il ne s’agissait pas là d’une proposition indécente, juste d’une alternative sans aucune arrière-pensée.

Trouble double

Ft. @Sasha Flores
TW : Prostitution, traite d'êtres humains.

L'eau a toujours eu un effet positif sur le jolly, même avant toute cette histoire, c'était un enfant de la mer. De ceux qui apprennent à nager avant de marcher, à surfer avant de courir. Et même s'il ne s'agit que d'une douche avec du savon, Biel apprécie la sensation, l'odeur qui disparaît en faveur de celle si familière dans laquelle il se roule bien volontiers. Mais dans ce rituel destiné à lui redonner le contrôle de son corps, c'est de Sasha dont il s'inquiète, désireux de savoir si elle va bien. Oui, et toi ? Et dans sa réponse, il y a comme un quelque chose qu'il devine, la connaissant sans doute beaucoup trop bien. Hum. qu'il souffle comme un oui, avant d'enchaîner sur une autre question bien plus précise : lui avait-on fait du mal ? Comme s'il pourrait faire quelque chose si c'était effectivement le cas.

Non, ne t’en fais pas. lui répond-elle, après tout, il sait que s'il y avait vraiment quelque chose, elle lui en parlerait, c'était une évidence. Il lui propose ensuite de la raccompagner, de passer du temps ensemble à demi-mot. Ca leur arrivait souvent, eux que l'on considérait comme des inséparables lorsque leurs métiers ne les emportaient pas à des endroits différents, ou la vie tout simplement. J’veux bien aller voir le lever du soleil sur ton toit. Il l'entend couper l'eau dans la cabine d'à côté, tandis que lui termine de se rincer sans se presser. Il y a une certaine lassitude dans ses gestes, car la nuit a été longue. Mais si t’es épuisé, tu sais que mon lit reste à ta disposition.

Il coupe l'eau à son tour et s'empare de la serviette qu'il a préparée et laissée sur un crochet. Je serais rentré de toute manière si t'étais partie avant moi. qu'il déclare tout en se séchant à l'abri des regards, que ce soit ceux de Sasha ou de quelqu'un d'autre. Il aimait conserver une certaine intimité synonyme de normalité dans toutes ces emmerdes. En plus, je suis tenté par un lever de soleil avec toi. qu'il souffle en souriant, lorsqu'il sort enfin, la serviette nouée à sa taille, quelques gouttelettes tachant encore son torse par endroit. On s'habille et on se retrouve devant la porte ? Parce que bien évidemment, il n'a pas pris ses habits avec lui, tout est resté dans sa loge. Il attend sa réponse, avant de filer direction sa loge pour passer son tee-shirt, son jean, ses baskets, et sa veste. Rien d'extraordinaire dans tout ça, il n'en a, de toute façon, pas les moyens. Et toutes ses maigres économies finissent précieusement sous son matelas dans l'espoir d'un jour en avoir assez pour mettre son plan à exécution. Il est prêt rapidement, et attend déjà son amie devant la porte, une cigarette nocturne ornant ses lèvres, tandis qu'il passe une main lasse dans ses cheveux.

Trouble double

ft @Biel Rodriguez tw : lieu de prostitution

Réponse peu satisfaisante, mais si compréhensible qu’elle ne la releva même pas, sachant ce qui se cachait derrière ce « Hum. » à peine audible avec le bruit de l’eau se déversant sur eux. Elle prit soin de le rassurer, ses contusions disparaitront tout aussi vite qu’elles étaient arrivées au vu de leur couleur pâle. Les clients, les privilégiés, ceux qui louaient et disposaient de leur corps à leur guise grâce à quelques liasses de billets, répondaient parfois à leur pulsion la plus primaire, rendant le coït sauvage car ils se laissaient totalement ou partiellement aller. Poupée de chiffon qui n’était là que pour assouvir leurs besoins bruts, ne voulant pas montrer ce côté-là à leur femme – quand bien même ils en avaient une.
Certaines nuits pouvaient se montrer si longues, si ce n’était pas interminables, que c’était toujours un soulagement quand le ciel commençait lentement à s’éclaircir, le drap étoilé laissant place à l’astre solaire pour une durée de plusieurs heures. La fatigue cumulée pouvait se lire dans les prunelles des jollys, la plupart n’échappant pas aux cernes se dessinant sous leurs yeux, les nuits blanches faisant partie de leur quotidien. « Je serais rentré de toute manière si t'étais partie avant moi. » La plupart du temps, les deux acolytes se rejoignaient, ici ou là dans le cabaret, restant parfois silencieux en train de s’en griller une avant de se séparer. Quand les mots étaient absents, la simple présence l’un pour l’autre prenait alors tout son sens. D’autres fois, ils se croisaient à peine, un simple coup d’œil suffisait à s’assurer que tous deux allaient bien tandis que le sommeil guidait leurs pas, ou alors ils allaient chez l’un ou chez l’autre pour avoir une présence réconfortante dans leur lit après une dure nuit, le tout sans ambiguïté.
« En plus, je suis tenté par un lever de soleil avec toi. » Oui, c’était une idée fort plaisante. Quand d’autres admiraient les couchers de soleil, synonymes de leur fin de journée, eux faisaient pareil avec le lever du soleil, apportant une touche d’exclusivité à cela. Elle lui adressa un sourire en le regardant sortir de sa cabine de douche par le reflet des miroirs. Biel avait son petit succès, que ce soit auprès de la gente féminine ou masculine, et il fallait être aveugle pour se demander pourquoi. C’était un beau garçon, le genre dont on disait qu’il avait une gueule d’ange. Sasha aurait pu craquer mille et une fois, si elle l’avait rencontré dans un autre contexte et si la tendresse qui les unissait ne leur était pas vitale. « On s'habille et on se retrouve devant la porte ? » Elle hocha de la tête. « A tout de suite, Biel. »
Mettant dans les poches de sa veste le nécessaire : téléphone, clés et clopes, elle rejoignit rapidement son ami qui l’attendait déjà à l’extérieur du Jolly Taps, depuis pas trop longtemps espérait-elle. Par réflexe, elle glissa également une cigarette entre ses lippes nudes, faisant s’évaporer ensuite la première taffe de nicotine inhalée. Sasha passa alors son bras autour du sien, les faisant entamer leur marche jusqu’au refuge. Le ciel encore sombre commençait cependant à pâlir mais on pouvait encore voir les étoiles et la lune, ce qui ne laissait aucun doute qu’ils arriveront dans les temps pour admirer leur fin de journée. « Dis, tu penses que tu pourras me recouper quelques mèches de cheveux ? J’en ai marre de ces fourches. » Hors de question de parler boulot quand ils en étaient en dehors du lieu de luxure, sauf exception qui impliquait uniquement les cas de grande nécessité. En dehors du cabaret, ils étaient juste deux êtres humains et non deux jollys. « J’pourrais faire les tiens aussi, ça fait longtemps, même si t’es toujours aussi beau avec tes mèches rebelles. » Un sourire se dessina sur son visage, posant sur lui un regard attendrissant.